CHRONIQUE DU TEMPS QUI PASSE
CHRONIQUE DU TEMPS QUI PASSE
UNE NOUVELLE DE ADILA KATIA
C’est arrivé sur le Net
CHAPITRE PREMIER
Avertissement : Cette histoire est basée sur des faits véridiques.
Elle est composée de trois chapitres.
ENTRE DEUX CŒURS
Souhila ferme le journal et médiSte sur l’article qu’elle a lu plusieurs fois. Il parle d’alphabétisation. Elle imagine son village, tout près de Tizi Ouzou, ouvrir une classe, pour accueillir toutes celles qui auraient envie d’apprendre à lire età écrire.
- Il n’y a pas d’âge pour apprendre, dit-elle à sa collègue qui est en train de vérifier le magasin. Le correspondant de la région, la met-elle au courant, parle d’accueillir les femmes au foyer qui voudraient apprendre à lire et à écrire. On pourrait y inscrire nos mères !
Aziza éclate de rire. Leurs mères se connaissent et leur passe-temps favori : médire sur les voisins, surveiller depuis les balcons ce que les gens font. Elles ont toujours quelque chose à dire. En bien, en mal. Elles ne sont jamais en panne de sujets croustillants.
- Je les voie mal se concentrer sur leurs livres ou leurs cahiers. Ce sera
l’occasion, pour elles, de rencontrer d’autres mégères et elles trou-
bleront les cours ! Même s’il y en a une qui voudra réellement
apprendre, elles ne la laisseront pas.
- Mais elles vont respecter l’enseignante !
Aziza secoue la tête.
- La première qu’elles détourneront de sa mission, c’est bien elle. Sinon
elles ne pourront pas bouger et s’occuper des autres.
- Tu crois vraiment qu’elles oseraient ?
- Souhila, ma chère, c’est à croire que tu ne les connais pas, dit Aziza,
très sérieuse. Elles excellent dans leur domaine. Même si elles s’ap-
pliquent à écrire et à lire, elles ne rateront rien. Crois-moi, on ferait
bien de ne pas leur en parler.
- Moi, malgré ce défaut, je suis tentée de mettre ma mère à l’école.
Cela l’occupera. Elle n’aura plus le temps de jaser. Aziza hausse
l’épaule. Elle range le cahier du Les magasin. Les deux amies ont
ouvert une pâtisserie. Elles se sont spécialisées dans les gâteaux de
fête. Cela leur rapporte beaucoup car elles ne chôment pas. Même en
hiver, elles travaillent. Il y a toujours des clients qui organisent des
réceptions, de dernière minute et c’est à elles qu’ils confient le soin
de préparer les gâteaux orientaux et les pâtisseries. Leur sérieux et la
qualité ont fait qu’elles ont une bonne réputation.
- Il faudra acheter…
Aziza fait la liste de ce qu’il manquera en magasin.
- Il faudra que ton père vienne avec nous. On mettra les achats dans sa
fourgonnette.
- Je lui dirais, dit Souhila. On programme ça pour demain matin.
Huit heures, c’est bon ?
- Tu partiras avec ton père pendant que j’assurerai l’ouverture de la
pâtisserie, dit Aziza.
- Bien.
Il est près de dix-neuf heures lorsqu’elles décident de fermer. Il ne
reste plus de gâteaux. Elles rentrent ensemble. Souhila pouffe de
rire en voyant leurs mères aux balcons qu’un seul mur sépare.
- Qu’est-ce qu’elles peuvent encore se dire ? demande Aziza en sou-
pirant.
- Elles profitent de l’air frais,répond Souhila, plus tolérante.
Elles ne font rien d’autre…
A. K.