art de l'islam

art de l'islam

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PRÉSENTATION

art de l'Islam,  production artistique, depuis le viie siècle, des régions de confession musulmane, situées au Moyen-Orient, en Afrique (essentiellement du Nord), en Inde septentrionale et en Espagne.

Les traits dominants de l’art musulman sont l’ornementation calligraphique et la forme de la mosquée, qui se sont développées dès les origines de l’islam.

2

 

UN ART RELIGIEUX

 

2.1

 

L’héritage culturel de l’art musulman

L’art de l’islam apparaît en 622  — l’an 1 de l’hégire, dans le calendrier musulman —, lorsque le prophète Mahomet s’expatrie à Yathrib (aujourd’hui Médine, en Arabie saoudite). Si les premiers disciples de Mahomet, originaires de la péninsule Arabique, ont légué à l’islam un héritage littéraire oral, leur culture matérielle disparue n’avait rien de comparable à celle des empires conquis. Aussi, les traditions locales ont-elles servi de base à l’art de l’islam ; absorbées et adaptées, elles sont devenues communes au monde musulman.

L’art de l’islam se développe ainsi à partir des styles romain, chrétien et byzantin ; de même, l’architecture et l’art décoratif sassanides jouent un rôle primordial dans le développement de l’art musulman. Les styles d’Asie centrale se transmettent lors des incursions turques et mongoles ; le contact avec l’art chinois influence pour sa part la peinture, la poterie et le textile.

2.2

 

Le monde musulman

L’histoire de l’art de l’islam classique compte trois grandes périodes : le califat omeyyade (661-750), période de formation pendant laquelle le territoire s’étend de la Syrie à l’Espagne ; le califat abbasside (750-1258), avec pour capitale Bagdad, illustre pour son goût des sciences et des arts (c’est au milieu de cette époque que l’influence persane est prédominante) ; enfin, la période turco-mongole qui dure jusqu’au xviiie siècle, dernière phase de l’islam classique.

Des styles distincts sont associés à la période turco-mongole en fonction des dynasties et des régions qui la caractérisent : le style des Turcs seldjoukides qui dominent l’Iran (la Perse), l’Irak, la Syrie et l’Anatolie jusqu’au xiiie siècle ; celui des Ilkhans en Iran oriental (1256-1349) ; celui des Timurides, protecteurs de la culture iranienne en Iran occidental (1378-1502) ; enfin, celui des Safavides, qui contrôlent l’Iran de 1502 à 1736. L’art connaît une période particulièrement riche sous les Ottomans, maîtres de la Turquie du xiiie siècle à 1923 et qui, au xvie siècle, étendent leur empire au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Des styles distincts se développent encore en Égypte, sous le règne des Fatimides (909-1171) et des Mamelouks (1250-1517).

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ARCHITECTURE

Le rituel de la foi a donné naissance à deux édifices architecturaux spécifiques : la mosquée (masjid), lieu de rassemblement communautaire, et l’école coranique (medersa). L’architecture profane comprend les palais, les caravansérails et les villes, dont les plans compliqués intègrent le nécessaire accès à l’eau et aux abris contre la chaleur. Le mausolée est à la fois le tombeau d’un dirigeant ou d’un saint et le symbole du pouvoir. Tous ces édifices ont en commun de nombreux éléments structurels et décoratifs.

3.1

 

L’architecture religieuse

 

3.1.1

 

Les mosquées

Les éléments caractéristiques de la mosquée sont apparus dès l’aube de l’islam. En 622, Mahomet s’expatrie à Yathrib (l’actuelle Médine, en Arabie saoudite) où, dans l’enceinte de sa modeste maison, ses compagnons se rassemblent pour prier. La forme simple de ce lieu est à l’origine de celle de la mosquée. C’était une cour fermée, rectangulaire, dotée d’un portique rudimentaire (zulla, utilisé à l’origine pour donner de l’ombre). Les premières mosquées, constituées d’une cour fermée (sahn) bordée de galeries ouvertes voûtées (iwan), et d’un bâtiment pour la prière, rappellent la structure de celle de Médine. Trois autres éléments de la mosquée sont bientôt caractéristiques de cet édifice : le minaret, tour du haut de laquelle le muezzin (le crieur) lance son appel cinq fois par jour ; la midha (latrines et salle d’ablutions) où les fidèles se purifient avant d’entrer dans la mosquée ; enfin la qibla, mur indiquant la direction vers laquelle s’oriente la prière. Le mihrab, une niche creusée dans la qibla, détermine l’organisation et l’orientation de l’espace de toutes les mosquées du monde.

Autre caractéristique de l’architecture musulmane, le dôme provient des traditions sassanides et chrétiennes. Datant de la fin du viie siècle, le dôme du Rocher, à Jérusalem, est l’un des dômes les plus anciens et les plus imposants ; il indique l’endroit d’où Mahomet a fait de nuit le voyage céleste (Mi’raj). Lorsque l’influence turco-ottomane s’accroît, les mosquées de type ottoman — qui reflètent l’héritage byzantin — sont construites dans tout l’empire. Celle de Sélim II (sultan de 1566 à 1574), conçue par l’architecte turc Sinan à Edirne, possède une coupole précédée d’une cour à arcades et entourée de dômes. Cette disposition rappelle la basilique Sainte-Sophie d’Istanbul, bel exemple d’édifice religieux byzantin transformé en mosquée. Cette forme, utilisée pour la mosquée de Soliman le Magnifique (la mosquée Süleymaniye, 1550-1557), influence la conception des mosquées en Turquie, en Syrie, en Égypte, en Arabie et en Afrique du Nord.

Probablement d’origine syrienne, adapté par les Omeyyades, utilisé dans les mosquées abbassides, puis en Égypte aux ixe et xe siècles, l’arc en ogive apparaît dans les mosquées mameloukes à partir du xiiie siècle.

3.1.2

 

Les médersas

Édifice tout à la fois religieux et civil, la médersa, ou école religieuse, apparaît en Iran sous les Abbassides. Sa forme sassanide donne lieu à un nouveau type de mosquée : la mosquée-médersa. Toutes deux ont quatre iwans (celui de la qibla est plus vaste) reliés par des arcades à deux étages. Dans la médersa, ces arcades mènent aux dortoirs alors que dans la mosquée, ce ne sont que des niches. Dans des médersas plus récentes, la cour est couverte d’une coupole.

Deux exemples de mosquées-médersas du xviie siècle se trouvent à Ispahan : la Masjid-i-Shah (mosquée royale), au dôme élevé, pointu, couvert de tuiles, situé derrière l’iwan principal et dont l’intérieur et les lambrequins sont revêtus de tuiles ; et la Masjid-i-Shaikh Lutfullah, au dôme de tuiles plus élégant encore.

3.2

 

L’architecture profane

 

3.2.1

 

Les villes

Durant la période omeyyade, le monde musulman produit ses plus beaux exemples de civilisation urbaine. Cependant, avec l’arrivée des Mongols, les villes sont détruites (et réduites à de simples villages), de même que le système d’adduction d’eau dont dépend leur survie.

Les fondements de la grande cité administrative sont posés à Samarra (en Irak) par les Abbassides. Au sein d’une énorme enceinte de murs de 175 hectares, la ville comprend des jardins, des bureaux, une mosquée, des bains et des quartiers résidentiels. Certaines des demeures sont décorées de peintures figuratives, mais le travail le plus remarquable consiste en des sculptures sur plâtre de motifs géométriques empruntés à l’Asie centrale. Les plans de villes, comme Samarra, sont remarquables par la conception des aqueducs et des égouts ; toutes les maisons sont équipées de bains et de latrines.

D’origine sassanide, l’organisation intérieure de « la Ville ronde », Bagdad (également en Irak, fondée en 762), se distingue du type précédent de villes. Elle est composée de deux cercles concentriques ouverts sur quatre avenues et au milieu desquels se dressent le palais du calife et la mosquée. Entre les deux cercles se trouvent les logements des gardes et des fonctionnaires. Le commerce et l’artisanat, d’abord tolérés à l’intérieur du premier cercle, sont ensuite repoussés à l’extérieur.

En Iran, les Safavides, derniers grands bâtisseurs, sont célèbres pour les ponts, les terrains de sport et les palais dotés de kiosques en bois d’où l’on voit fontaines et matchs de polo. Des bains publics, bazars, jardins, pavillons de jardin, ribats (murailles) et postes de frontière, il ne reste que quelques exemples en Tunisie.

3.2.2

 

Les palais

À l’époque des Omeyyades et des premiers Abbassides, les princes musulmans font construire des palais dans le désert de Syrie et d’Irak. Certains sont entourés de réserves de chasse (comme chez les derniers souverains sassanides) ou dotés de thermes à coupoles (comme chez les Romains). Ils témoignent de la synthèse entre héritages occidental et oriental qu’a su faire l’art primitif islamique — et de sa liberté créatrice avant que l’interdit de l’image ne soit rappelé au ixe siècle (concept de l’aniconisme ; voir iconoclasme). Les palais omeyyades sont décorés de mosaïques, de fresques murales et de stuc représentant des courtisans, des animaux et le calife lui-même. Cet ornement tire son origine de la tradition sassanide.

Des ensembles de palais comparables à ceux de Samarra sont édifiés au Caire, près de Cordoue (palais de Medinat al-Zahra fondé par Abd al-Rahman III en 936), à Grenade (célèbre par son palais de l’Alhambra, des xiiie-xive siècles, et par sa Cour des Lions que décore une fontaine entourée de lions de pierre), en Afrique du Nord et à Istanbul (où, en 1454, les Ottomans construisent le palais de Topkapi).

3.2.3

 

Les caravansérails

Apport seldjoukide, le caravansérail (han en turc) est un abri composé d’une grande salle flanquée d’ailes et d’une cour pour les animaux ; installé en campagne ou en ville, il sert pour le repos des caravanes et des marchands.

3.2.4

 

Les mausolées

En dépit des dogmes, les mausolées, aux décors raffinés de briques et de tuiles, élevés sur des tambours, deviennent aussi importants que les mosquées et les palais, tels les tombeaux des califes au Caire (xve siècle) et celui de Shah-i-Zindeh (xve-xvie siècle) construit par les Timurides à Samarkand (en Ouzbékistan). À Sultaniya (en Azerbaïdjan) apparaît un type de sépulture royale d’origine mongole (1309). Sa coupole, formée de deux calottes emboîtées reposant sur une base octogonale avec, à l’origine, des tours à chaque angle, préfigure le Taj Mahal, construit au xviie siècle à Agra en Inde, par deux architectes iraniens. Le mausolée du souverain de Boukhara (en Ouzbékistan, début du xe siècle) est d’un grand intérêt architectural : édifice carré en brique, il est doté d’une coupole posée sur des trompes (petits arcs coupant les angles du carré, d’origine sassanide) et non plus sur des pendentifs (triangles concaves voûtés, d’origine byzantine).

3.3

 

La décoration architecturale

Dans l’art islamique, le stuc, les briques et les tuiles ont une fonction décorative. Les Seldjoukides introduisent les briques et les tuiles vernissées, irisées comme leur poterie et dont Kāshān (en Iran) est le centre de production. Des revêtements entiers de mihrabs, composés de bandes verticales d’inscriptions coraniques, sont moulés dans ce type de faïence.

Les Timurides produisent des panneaux muraux constitués de mosaïques de tuiles colorées qui sont d’une saisissante beauté : chaque couleur vive est cuite séparément des autres pour obtenir une intensité maximale. Au xve siècle, des potiers iraniens établissent des ateliers de production en Turquie, à İznik. C’est à l’époque safavide que l’or et le vert apparaissent dans la production iranienne. Mais désormais, les différentes couleurs sont appliquées et cuites ensemble, ce qui en diminue l’éclat.

Autres types de décor, la sculpture et les moucharabiehs incrustés d’ivoire ornent les maqsura (paravents), les minbars (chaires pour le prêche), les fenêtres, les paravents et les portes, ainsi que divers éléments muraux. Certains édifices d’Espagne, de Turquie et d’Égypte mamelouke sont recouverts de reliefs de pierre incrustés de marbre. Parmi le mobilier de mosquée, les lampes et les tapis raffinés et colorés peuvent être considérés comme décoratifs. Grâce à la lumière et à la couleur qu’ils introduisent, ils embellissent l’intérieur de l’édifice.

4

 

ARTS GRAPHIQUES

 

4.1

 

La calligraphie

L’écriture coufique angulaire convenant à la sculpture sur pierre apparaît à la fin du viie siècle dans les premiers manuscrits coraniques. Le Coran, ouvrage dans lequel est consignée la révélation divine du prophète Mahomet, est le lieu privilégié pour l’ornementation calligraphique dans la production artistique de l’islam. En effet, l’élégance de l’écriture arabe est à l’origine du développement de la calligraphie qui décore, outre les pages du Coran, mosquées et mobilier d’inscriptions coraniques. Les signes diacritiques placés au-dessus des lettres y sont peints en rouge, et les ornements dorés qui séparent les sourates (chapitres) s’opposent à la lourde écriture noire. Au xiie siècle, durant la période seldjoukide, se développe le naskhi, une écriture cursive, fluide et souple à l’origine de l’arabe moderne.

4.2

 

L’enluminure

Dans l’art musulman, la peinture, qui sert des objectifs spécifiques, consiste en l’art d’illustrer les livres — la notion occidentale de peinture de chevalet est inexistante (voir enluminure). Les plus anciennes peintures parvenues jusqu’à nous sont les miniatures de manuscrits scientifiques grecs traduits en arabe, les Fables de Bidpay (v. 300 apr. J.C.) et les Maqamat d’al-Hariri (1054-1122) relatant les aventures du voyageur Zayd. Leur style est proche de celui de l’école de Bagdad du xiiie siècle. Les illustrations scientifiques sont des dessins classiques. Les peintures profanes, aux couleurs vives, représentent deux ou trois personnages et un paysage décoratif.

La miniature il-khanide s’épanouit au xive siècle à Tabriz (en Iran) ; voir art persan. L’influence chinoise dans les détails des paysages, l’expression de l’émotion et la complexité de la composition caractérisent cette nouvelle école. De nombreux poèmes épiques persans sont illustrés dans ce style, le meilleur exemple étant le Chahname (Livre des rois, xie siècle), grande épopée écrite par Firdoussi.

L’art de la miniature continue de se développer au xve siècle à Herat sous l’égide des Timurides. Behzad est l’un des miniaturistes les plus remarquables de cette dynastie ; bon nombre de ses scènes dramatiques ne sont pas limitées dans les bordures conventionnelles et ses personnages ont une réalité psychologique rare dans cette tradition.

Les souverains ottomans protègent l’art du livre ; une école turque, née à Tabriz au xive siècle, peint des scènes de cour et des scènes militaires dans une manière décorative toute particulière. Les artistes safavides produisent les œuvres classiques du genre, tout en introduisant des éléments de l’art du portrait, sous l’influence européenne.

Enfin, un style moghol, influencé par l’art indien ancien, se développe dans l’Inde musulmane du xvie au xixe siècle.

5

 

ARTS DÉCORATIFS

L’aniconisme islamique — interdiction de l’image, suspecte de mener à l’adoration des idoles — rappelle l’iconoclasme byzantin (voir iconoclasme). Il est appliqué dans des contextes religieux, comme pour les mosquées et leur mobilier, les illustrations du Coran et leurs étuis. Mais il ne touche pas les domaines plus profanes. La force de l’interdiction dépend aussi du degré d’orthodoxie du pouvoir en place.

Dans le palais de Mshatta (actuelle Jordanie, milieu du viiie siècle) aux murs décorés de reliefs de pierre, il y a une distinction entre le décor des bâtiments religieux et l’ornement profane. Les motifs sont abstraits pour les premiers et figuratifs pour les seconds. Mais à cause de cette prohibition, les motifs sont stylisés et dénués de tout souci d’anatomie ou de perspective. Loin de brider la liberté de création, cela permet une ornementation fondée sur des formes géométriques, végétales et épigraphiques, dont les riches combinaisons génèrent bientôt l’arabesque, mode de représentation spécifique à l’art islamique.

Enfin, la Tradition (Sunna) condamne l’utilisation des matériaux luxueux ou précieux dans les arts décoratifs. Les arts appliqués islamiques se limitent donc à la céramique, aux vases de bronze, à l’ivoire et aux sculptures sur bois. Il y a une autre raison à cette modestie, c’est l’émergence d’une classe moyenne urbaine qui, bien que s’intéressant aux arts, souhaite satisfaire avant tout des besoins pratiques.

5.1

 

La céramique

La céramique est l’une des traditions les plus raffinées de l’art islamique ; elle bénéficie d’un sens de l’innovation et d’une créativité comparables à celles qui, dans d’autres cultures, sont réservées aux beaux-arts. Il semble que la classe moyenne aisée collectionne la céramique avec une avidité semblable à celle des Hollandais pour les peintures de portraits et de genre au xviie siècle. La définition de cette première période est fondée sur les découvertes des fouilles de Samarra (en Irak). La porcelaine importée de Chine dans la région de Bagdad éveille l’intérêt des amateurs et des potiers abbassides, mais sa perfection ne peut être égalée avec l’argile locale.

La céramique chinoise Tang, au décor vert et jaune, est imitée avec succès, mais pour obtenir un effet de porcelaine, les potiers abbassides inventent un vernis à reflets métalliques qui donne un éclat lustré et crémeux à la matière. Certaines de ces pièces sont décorées de simples motifs bleus, bordures ou inscriptions. Elles auraient inspiré la porcelaine « bleu et blanc », elle-même imitée ensuite par les potiers musulmans. La technique de la peinture lustrée se développe à Samarra où les potiers appliquent un mélange à reflets métalliques sur les pièces déjà cuites. Une seconde cuisson, à une température plus basse, permet d’obtenir un motif métallique brillant brun, vert ou rouge qui semble transformer la pièce en or. Ce procédé se répand en Europe, en Afrique du Nord et en Asie.

De la fin du viiie au xi



01/08/2009
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